Bussy et les Boulettes !
C’est une histoire ancienne, qui ne s’est pour ainsi dire jamais interrompue. Depuis que ce navet fourrager fut introduit dans la région vraisemblablement sous le règne de Louis XVI !
On cultivait la Boulette dans les parcelles pas trop éloignées des villages, celles qui étaient régulièrement fumées et de ce fait, étaient les plus aptes à donner de beaux gros navets.
Les boulettes étaient cultivées dans toute la Champagne pouilleuse* pour nourrir les animaux avant les humains et puis, elle jouait le rôle d’engrais vert !
Boulette, quel drôle de nom pour un navet et aujourd’hui quelle image a priori handicapante pour un légume ! Le mot boulette fut rattaché à sa nouvelle région d’adoption, la Champagne. Ainsi est née celle qui allait devenir une légende locale après être tomber dans l’oubli vers le milieu du 20ème siècle, La Boulette de Champagne.
L’arrivée des betteraves fourragères sonna le glas de cette culture…..Nous sommes au 19ème siècle et déjà, la recherche de productivité est sans pitié pour les plantes les moins performantes ! Toutefois, les boulettes continuèrent à être cultivées dans les vallées de la Noblette et de la vesle. A cette période, le nom se personnifie, le mot Champagne est remplacé par celui du village ou la Boulette est produite. La disparition des Boulettes de notre culture locale coïncide avec la révolution agricole que connue notre région avec le défrichage des sapins et l’utilisation des engrais minéraux…. La champagne pouilleuse* allait laisser la place a une des régions les plus productives au monde.
Il y a quelques années de cela, je me suis dis que ce serait bien de lui donner une nouvelle vie à cette boulette. Pour moi, ses qualités gustatives étaient exceptionnelles. Après quelques années de sélection génétique et de recherche en partenariat avec des chefs étoilés de la région pour valider ce travail, la Boulette de Bussy retrouvait une nouvelle jeunesse !
Le trait d’union entre hier et aujourd’hui, fut un agriculteur aujourd’hui disparu, Michel Baty qui continua la production pour sa consommation personnelle.
J’ai encore en mémoire les récits de Michel me racontant comment un négociant venait acheter les Boulettes fraîchement récoltées mais aussi les semis à trois doigts après les moissons, le passage du cheval traînant une herse retournée pour ne pas trop enterrer la graine, la récolte que l’on allait chercher dans le tombereau en bois chaque semaine jusqu’aux grands froids, ou encore celui de Roger Lopin également disparu qui me disait qu’étant jeune, il n’aimait pas la saison des Boulettes parce qu’il était de corvée d’équeutage le jeudi avant le passage de l’acheteur !
*Champagne Pouilleuse : Notre région de champagne était aride et peu de plantes s’épanouissaient sur cette terre au sous-sol crayeux ! Sauf une, le Thym Serpolet qui dominait la biodiversité d’alors. Nos ancêtres lui avaient donné le nom de Petit Pouliot car ses graines ressemblent à des puces mais aussi parce que son essence a des propriétés répulsives et insecticides.